cesse. Voilà pourquoi la matière joue un si grand rôle dans l’explication des phénomènes physiques. Ce qui frappe, au contraire, dans le monde céleste, c’est le caractère de régularité et d’immobilité des êtres qui l’habitent. Un seul changement est à remarquer, c’est le changement d’espace. Là, point de génération ni de corruption, point de changement de forme, de quantité, de qualité, etc. Aristote n’avait besoin du principe matériel que pour expliquer le changement local, c’est-à-dire le simple mouvement. Voici donc à quoi se réduit l’intervention de ce principe dans le monde céleste :
« Les substances qui l’habitent sont en elles-mêmes pures de toute matière. De plus, elles déterminent leurs divers mouvements par une force qui leur est propre (ψυχαί). Mais si elles étaient abandonnées à leur propre impulsion, leurs mouvements seraient sans règle et sans but. Or, il est de fait qu’une règle, qu’un but uniforme dirige tous leurs mouvements ; il faut donc que l’une et l’autre viennent d’ailleurs. Elles sont donc dépendantes, sinon dans leur nature, au moins dans leur action ; c’est seulement sous ce rapport qu’elles tombent sous la condition de la puissance et de la matière. Ainsi les astres, tout en étant doués d’un mouvement spontané, obéissent au mouvement universel imprimé par un moteur étranger et supérieur. » Théorie des premiers principes, p. 48, sqq.
M. Ravaisson, Essai, t.1, p. 103, 104, remarque aussi tout ce qu’il y a de bizarre dans la théorie en question. Mais il résout la difficulté d’une autre manière :
« Le dogme, dit-il, qui couronne la théologie d*Aristote, est l’unité du moteur immobile et éternel ; or, dans ce chapitre (le 8e), se trouve une théorie longuement déduite, selon laquelle à chaque sphère céleste correspondrait un moteur immobile et éternel. Comment concilier ces deux doctrines ? L’antiquité ne s’en est pas mise en peine : elle attribue à Aristote l’hypothèse d’une hiérarchie de dieux régulateurs des mouvements célestes, hypothèse toute dans le génie pythagoricien et platonicien, et qui répugne absolument à la philosophie péripatéticienne ; mais l’antiquité n’est pas le