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jusqu’à l’infini. Le but de tout mouvement est donc un de ces corps divins qui se meuvent dans le ciel.

Il est évident, du reste, qu’il n’y a qu’un seul ciel. S’il y avait plusieurs cieux, comme il y a plusieurs hommes, le principe de chacun d’eux serait un, sous le rapport de la forme, mais multiple quant au nombre. Or, tout ce qui est multiple numériquement a de la matière, car il n’y a, lorsqu’il s’agit de plusieurs êtres, d’autre unité, d’autre identité entre eux, que celle de la notion substantielle : ainsi, il y a la notion de l’homme en général ; mais Socrate est véritable, ment un. Quant à la première essence, elle n’a pas de matière, car elle est une entéléchie[1]. Donc le premier moteur, le moteur immobile est un, et formellement et numériquement ; et ce qui est en mouvement éternellement et d’une manière continue est unique ; donc il n’y a qu’un seul ciel.

Une tradition venue de l’antiquité la plus reculée, et transmise à la postérité sous le voile de la fable, nous apprend que les astres sont des dieux, et que la divinité embrasse toute la nature ; tout le reste n’est qu’un récit fabuleux imaginé pour persuader le vulgaire, et pour servir les lois et les intérêts communs. Ainsi on donne aux dieux la forme humaine, on les représente sous la figure de certains animaux ; et mille inventions du même genre qui se rattachent à ces fables. Si l’on sépare du récit le principe lui-même, et qu’on ne considère que cette idée, que toutes les essences

  1. « Ἐντελέχια, ce qui a en soi sa fin, qui, par conséquent, ne relève que de soi-même, et constitue une unité indivisible. » Note de M. Cousin.