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animaux, ou, en général, des objets inanimés ? Et d’ailleurs, il va contre la raison, à ce qu’il me semble, d’imaginer des substances éternelles semblables aux substances sensibles et périssables.

Si donc le principe que nous cherchons maintenant n’est pas séparé des corps, quel principe pourrait-on admettre de préférence à la matière ? Mais la matière n’est pas en acte, elle n’est qu’en puissance. D’après cela, la forme et l’essence paraîtraient avoir plus de droits au titre de principe, que la matière. Mais la forme matérielle est périssable ; de sorte qu’il n’y a absolument aucune substance éternelle, séparée et en soi : or, cela est absurde. Car il y en a évidemment quelqu’une : presque tous les esprits les plus distingués se sont occupés de cette recherche, convaincus de l’existence d’un principe, d’une substance de ce genre. Comment, en effet, l’ordre existerait-il, s’il n’y avait pas quelque chose d’éternel, de séparé, d’immuable ?

Ajoutons que s’il existe un principe, une substance de la nature de celle que nous cherchons ; si elle est la substance unique de toutes choses, substance des êtres éternels et des êtres périssables tout à la fois, il s’élève une autre difficulté : Comment, le principe étant le même, les êtres sont-ils les uns éternels, les autres non-éternels[1] ? C’est là une chose absurde. S’il y a deux substances qui soient principes, l’une des êtres périssables, l’autre des êtres éternels, et si en même temps la substance des êtres périssables est

  1. Voyez liv. III, 4, t.1, p. 88 sqq.