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rien concevoir[1]. La différence parfaite est une fin, au même titre que tout est dit parfait, qui a pour caractère d’être la fin de quelque chose[2]. Au-delà de la fin il n’y a rien ; car, dans toute chose, elle est le dernier terme, la limite. C’est pour cela qu’il n’y a rien en dehors de la fin ; et ce qui est parfait ne manque absolument de rien.

Il est évident dès lors, que la contrariété est une différence parfaite ; et la contrariété ayant un grand nombre d’acceptions, ce caractère de différence parfaite l’accompagnera dans ces différents modes. Cela étant, une chose unique ne saurait avoir plusieurs contraires. Car, au delà de ce qui est extrême il ne peut pas y avoir quelque chose qui soit plus extrême encore, et une seule distance ne peut pas avoir plus de deux extrémités. En un mot, si la contrariété est une différence, la différence n’admettant que deux termes, il n’y en aura que deux non plus dans la différence parfaite.

La définition que nous venons de donner des contraires devra s’appliquer à tous les modes de la contrariété ; car, dans tous les cas, la différence parfaite est la différence la plus grande : en effet, en dehors de la différence de genre et de la différence d’espèce nous ne

  1. Voyez liv. V, 16, t. I. p. 187 sqq.
  2. Τῷ τέλος ἔχειν… τέλεια. Nous avons déjà fait observer ailleurs, t.1, p. 188, que cette analogie des termes, qui marque si bien dans le grec la liaison des idées, nous fait souvent défaut dans la langue française, là où elle nous serait si opportune : le lecteur est donc prié de faire de temps en temps la part des nécessités de notre idiome, lorsque la traduction lui offre quelque trait choquant par son étrangeté.