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produit : ainsi de l’art de bâtir dérive non-seulement la construction mais la maison. Toutefois il n’y a réellement pas de fin dans le premier cas ; c’est surtout dans le second que la puissance a une fin. Car la construction existe dans ce qui est construit ; elle naît, elle existe en même temps que la maison. D’après cela, dans tous les cas où, indépendamment de l’exercice pur et simple, il y a quelque chose de produit, l’action est dans l’objet même qui est produit ; la construction, par exemple, dans ce qui est construit, le tissage dans ce qui est tissu. De même pour tout le reste ; et en général dans ce cas le mouvement est dans l’objet même qui est en mouvement. Mais toutes les fois qu’en dehors de l’acte il n’y a rien autre chose de produit, l’acte existe dans le sujet même : la vision, par exemple, est dans l’être qui voit ; la théorie, dans celui qui fait la théorie ; la vie, dans l’âme[1] (27) ; et par suite, le bonheur même est un acte de l’âme, car le bonheur aussi est une sorte de vie[2].

Il est donc évident que l’essence et la forme sont des actes ; d’où il suit évidemment aussi que l’acte, sous le rapport de la substance, est antérieur à la puissance. Par la même raison, l’acte est antérieur sous le rapport du temps ; et l’on remonte, comme nous l’avons dit, d’acte en acte, jusqu’à ce qu’on arrive à l’acte du moteur premier et éternel.

Du reste, on peut rendre plus manifeste encore la

  1. Voyez le De Anima, passim, et particulièrement au liv. Ι, 1-4. Bekker, p. 402 ; liv. II, 1, Bekk., p. 412.
  2. Voyez. Ethic. Nicomach., I, 1, Bekker, p. 1094-95.