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fait de la matière : elle est le principe de tout ce qui est accidentel. Elle est la cause du mal ; et par là, la divinité se trouve déchargée de cette responsabilité que les sceptiques avaient voulu faire peser sur elle, en l’accusant de tous les désordres du monde. Le dieu d’Aristote est uniquement cause du bien ; mais c’est aux dépens de la puissance infinie qu’Aristote lui donne cet attribut, aux dépens de la Providence même, laquelle ne peut pas être morcelée et s’exercer à demi : la matière reconnue comme puissance du mal est un dernier reste de ce dualisme qui apparaît plus ou moins clairement au fond de la plupart des systèmes de l’antiquité.

Enfin la matière, en tant qu’elle est opposée à la forme, est la cause de la pluralité des êtres, et, pour les objets sensibles, l’unité dans la pluralité n’est autre chose que la réalisation de la forme dans la matière. Chaque être est à la fois un et multiple, un par la forme, multiple par les éléments.

Nous avons vu que la matière proprement dite n’était pas véritablement une puissance, si ce n’est accidentellement, et comme cause du hasard ; elle peut devenir, mais elle n’a pas en elle-même la cause du devenir et de l’être : il en est de même de la matière réalisée : ce n’est pas en tant que matière qu’elle est une puissance, c’est en tant que possédant la forme, en tant que déterminée. La puissance, le pouvoir du changement dans un autre être en tant qu’autre, comme s’exprime Aristote, peut exister soit dans des êtres inertes, soit dans les êtres animés, dans