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l’être, ni aucun attribut général ne peuvent être substance… ; la substance n’existe dans aucun autre être que dans elle-même, et dans l’être dont elle est substance[1]. »

Platon s’était montré exclusif ; Aristote ne l’est guère moins ; mais il serait injuste de lui en faire un crime. S’il s’est trop préoccupé d’un point de vue des choses, il était difficile qu’il n’en fût pas ainsi. La doctrine platonicienne était dangereuse, au moins par sa tendance ; elle renfermait un germe d’erreur qui s’est développé plus tard[2]. Effrayé de la tendance, craignant de voir l’individu s’abîmer dans une vague généralité, Aristote lui attribue une importance exagérée ; il lui fait don de l’indépendance absolue, il oppose la théorie de la forme à la théorie des idées, et s’il est quelquefois contraint à se rapprocher de Platon c’est toujours à regret.

Ainsi, dès le point de départ, opposition complète entre les systèmes de Platon et d’Aristote : forme au lieu d’idée, c’est-à-dire, particularité au lieu de généralité. Mais, nous l’avons dit, cette opposition se dément quelquefois ; la forme ne peut point rester purement individuelle ; la généralité reparaît sans cesse, elle se glisse au milieu de la théorie de la forme : entraîné par la force même des choses, Aristote change plus d’une fois de point de vue, et dévie, malgré qu’il en ait, de la route qu’il s’était tracée. Là est un lien qui réunit nécessairement Aristote et Platon : il n’était pas plus possible à Aristote de supprimer l’universalité qui est dans le

  1. Mét., VII, et passim.
  2. Mysticisme d’Alexandrie.