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meure permanente au milieu des changements de tout genre que subissent les objets. Mais, d’un autre côté, elle n’est pas déterminée ; bien loin de là, son essence est l’absence même de toute détermination ; elle n’est rien par elle-même, sinon une possibilité d’être, une simple puissance de devenir[1]. Sous ce rapport, l’ensemble de la forme et de la matière, c’est-à-dire la matière réalisée, a plutôt le caractère de substance que la matière indéterminée qui, pouvant être toute chose, n’est rien à elle seule. Là n’est point encore cependant la véritable substance. L’être réalisé n’est point un premier principe : ce titre n’appartient et ne peut appartenir qu’à la forme pure, à l’essence.

Qu’est-ce donc que la forme, et quelle est la nature de ce principe ? Cette question, qui est le point fondamental du système d’Aristote, n’a pas toujours reçu de lui, comme déjà nous l’avons indiqué, une solution précise : est-elle un genre, un exemplaire commun qui se reproduit dans les individus ; ou bien est-elle individuelle, inséparable de chaque être ? Elle est l’un ou l’autre selon le besoin, ou plutôt elle est tout à la fois l’un et l’autre : cependant Aristote incline généralement à placer dans la forme le principe de l’individualité[2]. C’est-là ce qui le distingue de Platon. La forme substantielle est, selon lui, l’essence déterminée ; elle est opposée par là à la matière, laquelle n’a, par elle-même, aucune qualité, aucune détermination.

La forme pure, c’est l’être, abstraction faite de tout élément constitutif ; ce n’est point seulement un attri-

  1. Livres VII et VIII.
  2. Liv. VII.