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dent n’a guère même qu’une existence nominale[1]. Il suffit d’étudier la nature de l’accident, le mode de son existence, pour se convaincre qu’il ne peut être l’objet d’une science. L’accidentel est opposé au nécessaire ; c’est ce qui n’est ni toujours, ni ordinairement ; c’est par exemple le froid dans la canicule, c’est la guérison opérée par le cuisinier. L’accident ne peut être le résultat d’une force, d’une puissance proprement dite ; il n’a qu’une cause accidentelle ; et cette cause, c’est la matière, en tant que susceptible d’être autre qu’elle n’est ordinairement. C’est une cause vague, incertaine, qui ne saurait être scientifiquement déterminée. Elle est par conséquent en. dehors de la science.

Il y a de la vérité dans ces assertions ; cependant elles demandent à être précisées davantage. Il est incontestable que l’accident, en tant qu’accident, ne peut être l’objet d’une science ; qu’il appartient, moins qu’à toute autre science, à la philosophie, à la science des êtres immuables. Mais l’être accidentel existe-t-il réellement dans le sens où le prend Aristote ; est-il vrai qu’il ne peut être rapporté à une cause nécessaire et rentrer dans le domaine de la science ? Cela paraît évident à l’homme qui ne fait que débuter dans l’observation de la nature ; une multitude de faits apparaissent, qui ne semblent se ramener à aucune loi, à aucun principe ; le désordre se montre de toutes parts. Mais à mesure que l’intelligence grandit, que l’observation vient compléter nos connaissances, nous supprimons

  1. Mét., liv. VI.