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d’insurmontables difficultés[1]. Par exemple appartient-il à une seule science d’étudier toutes les espèces de causes, ou bien chaque cause est-elle l’objet d’une science particulière ? Parmi ces causes, quelle est celle qui appartient plus spécialement à la philosophie ? Est-ce la cause finale, est-ce la substance ? Cette dernière supposition admise, toutes les substances sont-elles l’objet d’une seule science, ou de plusieurs ? La philosophie première embrasse-t-elle seulement les substances, ou bien s’applique-t-elle aussi à leurs propriétés ? Est-ce à elle qu’il appartient d’étudier l’être sous ses divers rapports, similitude, dissemblance, etc. ; n’est-ce pas là au contraire l’objet propre de la dialectique ? Les principes de la démonstration sont-ils aussi de son domaine ? Enfin quelle différence y a-t-il entre la philosophie première et les autres sciences, les mathématiques et la physique par exemple ? Toutes questions que doit se poser le philosophe. Avant d’aborder l’étude d’une science, il est indispensable de s’être formé une idée exacte de sa portée, des objets qu’elle embrasse. Tant qu’on n’a pas déterminé la carrière à parcourir, la science n’est réellement pas possible ; elle reste flottante, incertaine, elle ne peut se définir elle-même. Ç’a été là en général le vice de la philosophie, dans les temps modernes ; faute d’avoir bien établi où elle commence, où elle doit s’arrêter, on a philosophé au hasard ; on a fait de la philosophie, bonne ou mauvaise, mais on n’a point constitué la philosophie ; on

  1. Mét. I, III. Περὶ τῶν ἀπορημάτων.