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Voilà un point de vue de l’antériorité. Il en est un autre, l’antériorité de connaissance, et cette antériorité est absolue. Mais il y a deux ordres de connaissance, la connaissance essentielle et la connaissance sensible. Pour la connaissance essentielle, c’est l’universel qui est antérieur ; c’est le particulier pour la connaissance sensible. Dans l’essence encore, l’accident est antérieur au tout : le musicien est antérieur à l’homme musicien ; car il n’y aurait pas de tout sans parties. Et pourtant l’existence du musicien n’est pas possible, s’il n’y a pas quelqu’un qui soit musicien. L’antériorité s’entend enfin des propriétés de ce qui est antérieur : la rectitude est antérieure au poli ; car l’une est une propriété essentielle de la ligne, l’autre est une propriété de la surface.

Il y a donc l’antériorité et la postériorité accidentelles, et celles de nature et d’essence. L’antériorité de nature n’a pas pour condition l’antériorité accidentelle ; mais celle-ci ne peut jamais exister sans celle-là : telle est la distinction que Platon a établie. D’ailleurs, l’être a plusieurs acceptions : ce qui est antérieur dans l’être, c’est-là le sujet ; aussi la substance a-t-elle la priorité.

Sous un autre point de vue, la priorité et la postériorité se rapportent à la puissance et à l’acte. Ce qui est en puissance est antérieur ; ce qui est en acte, postérieur. Ainsi, en puissance, la moitié de la ligne est antérieure à la ligne entière, la partie est antérieure au tout, la matière à l’essence. Mais en acte, les parties sont postérieures au tout ; car c’est après la dissolution du tout qu’elles sont en acte.