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autre plus mauvaise. Et s’ils ont cette pensée, nécessairement ils conçoivent aussi que tel objet est un homme, que tel autre n’est pas un homme, que ceci est doux, que cela n’est pas doux. En effet, ils ne recherchent pas également toutes choses, et ne donnent pas à tout la même valeur : s’ils croient qu’il est de leur intérêt de boire de l’eau, de voir un homme, alors ils se mettent en quête de ces objets. Et pourtant il le faudrait, si l’homme et le non-homme étaient identiques l’un à l’autre. Mais, comme nous l’avons dit, il n’y a personne qu’on ne voie éviter telle chose, n’éviter pas telle autre. De sorte que tous les hommes ont, ce semble, l’idée de l’existence réelle, sinon de toutes choses, au moins du meilleur et du pire.[1]

Mais quand même l’homme n’aurait pas la science, quand il n’aurait que des opinions, il faudrait qu’il s’appliquât beaucoup plus encore à l’étude de la vérité ; comme le malade s’occupe plus de la santé que l’homme qui se porte bien. Car celui qui n’a que des opinions, si on le compare à celui qui sait, est, par rapport à la vérité, dans un état de maladie.

D’ailleurs, en supposant même que les choses sont et ne sont pas de telle sorte, le plus et le moins existeraient encore dans la nature des êtres. Jamais on ne


  1. Asclépius rapproche du système qu’Aristote vient de combattre, l’opinion des Manichéens sur le double principe. Il y a peut-être quelque analogie ; mais Asclépius force les conséquences, en identifiant l’opinion des Manichéens à celle des anciens sur la certitude. D’ailleurs, les expressions injurieuses (θεοχόλωτοι), et les plaisanteries (ἔστι πλατὸν γέλωτα καταχέαι), dont se sert Asclépius, n’annoncent pas chez lui, sur ce sujet, une grande impartialité. Voyez Schol., p. 666.