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une chose unique. Une galère, un mur, et un homme, doivent être la même chose, si l’on peut affirmer ou nier tout de tous les objets, comme sont forcés de l’admettre ceux qui adoptent la proposition de Protagoras.[1] En effet, si l’on pense que l’homme n’est pas une galère, évidemment l’homme ne sera pas une galère. Et par conséquent il est une galère, puisque l’affirmation contraire est vraie. Nous arrivons ainsi à la proposition d’Anaxagore. Toutes les choses sont ensemble. De sorte qu’il n’existe rien qui soit vraiment un. L’objet des discours des philosophes en question, c’est donc, ce semble, l’indéterminé ; et, quand ils croient parler de l’être, ils parlent de non-être. Car, l’indéterminé, c’est l’être en puissance et non en acte.

Ajoutez à cela que ceux dont nous parlons doivent aller jusqu’à dire qu’on peut affirmer ou nier également tout de toutes choses. Il serait absurde, en effet, qu’un être eût en lui sa propre négation, et n’y eût pas la négation d’un autre être qui n’est pas en lui. Je dis, par exemple, que s’il est vrai de dire que l’homme n’est pas un homme, évidemment il est vrai aussi de dire que l’homme n’est pas une galère. Si nous admettons l’affirmation, il nous faut donc aussi admettre la négation. Admettrons-nous au contraire la négation plutôt que l’affirmation ? Mais alors la négation de la galère se trouve dans l’homme plutôt que la sienne propre. Que s’il a en lui cette dernière, il a donc celle


  1. L’homme, suivant Protagoras, est la mesure de toutes choses. Par conséquent tout ce qui parait est vrai, tout est également vrai, et les affirmations contradictoires sont vraies en même temps.