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causes[1]. Remarquons d’abord qu’en cherchant à saisir les causes des êtres qui tombent sous nos sens, ils ont introduit d’autres êtres en nombre égal ; comme quelqu’un qui, voulant compter, et n’ayant qu’un petit nombre d’objets, croirait l’opération impossible, et en augmenterait le nombre pour pouvoir compter. Car le nombre des idées est presque aussi grand, ou peu s’en faut, que celui des êtres dont ils cherchaient les causes, et dont ils sont partis pour arriver aux idées. Chaque chose a son homonyme, non seulement les essences, mais aussi tout ce qui est un dans la multiplicité des êtres, soit parmi les choses sensibles, soit parmi les choses éternelles.

Ensuite, de tous les arguments par lesquels on démontre l’existence des idées, aucun n’établit cette existence. La conclusion de quelques-uns n’est pas nécessaire ; d’après les autres il y aurait des idées de choses même pour lesquelles on n’admet pas qu’il y en ait. En effet, d’après les considérations tirées de la science, il y aura des idées de tous les objets dont il y a science ; d’après l’argument de l’unité dans la multiplicité, il y en aura même des négations ; et, en tant qu’on pense à ce qui a péri, il y aura des idées des objets qui ont péri, car nous pouvons nous en faire une image. D’ailleurs, les raisonnements les plus rigoureux conduisent soit à admettre des idées de ce qui est relatif : or, on n’admet pas même que le relatif

  1. Les arguments à l’aide desquels Aristote va réfuter la théorie des idées, se retrouvent plus loin à peu près dans le même ordre, et le plus souvent dans les mêmes termes. Voyez XIII, 4, 5.