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pas les parties sexuelles des femelles, comme les autres solipèdes, mais ils flairent l’excrétion elle-même. Ainsi, le résidu tout entier tourne au développement du corps et à sa grosseur. § 18[1]. Par suite, la mule pourrait bien concevoir, ce que d’ailleurs on a déjà observé ; mais il est absolument impossible qu’elle nourrisse le fœtus et qu’elle mette bas. Quant au mâle, il pourrait sans doute engendrer, parce que le mâle est naturellement plus chaud que la femelle, et aussi, parce que le mâle n’apporte dans l’accouplement rien de matériel. Le produit qui sort du mulet s’appelle un Ginnos ; c’est un mulet contrefait ; car ce sont des Ginnos qui viennent du cheval et de l’âne, quand le fœtus a souffert de quelque maladie dans la matrice. Le Ginnos est quelque chose, en effet, comme les arrière-porcs dans la race des porcs ; car, dans cette race, on appelle arrière-porcs le produit qui est mutilé dans la matrice de l’animal. C’est d’ailleurs un accident qui peut atteindre un fœtus quelconque. La même difformité

  1. On a déjà observé. Nouvelle preuve de l’attention qu’apportait Aristote à observer exactement les phénomènes, avant de chercher à les expliquer. — Impossible qu’elle nourrisse. C’est tout au moins très spécieux. — Il pourrait sans doute engendrer. Ainsi, Aristote semble imputer la stérilité à la mule toute seule. — Un Ginnos. J’ai dû conserver le mot grec. — Des Ginnos qui viennent du cheval et de l’âne. Ceci semble une contradiction de ce qui vient d’être dit sur le Ginnos, qui semblait ne provenir que du mulet tout seul. — Arrière-porcs. C’est la traduction exacte de l’original. Comme la truie fait beaucoup de petits, il arrive assez souvent que les derniers sont mal conformés. — Qui peut atteindre un fœtus quelconque. Le fait est exact. — Nains ou pygmées. Il n’y a que le dernier mot dans le texte. Voir sur les Pygmées l’Histoire des Animaux, liv. VIII, ch. XIV, § 3, p. 58, de ma traduction. — On a pu remarquer, dans cette fin du second Livre, que les idées sont souvent confuses, et qu’elles ne sont pas classées avec assez d’ordre. Ce même défaut se retrouve dans plusieurs autres parties de toute l’histoire naturelle d’Aristote. Cette exposition irrégulière peut nous choquer à bon droit. Mais pour la comprendre et l’excuser, il faut se reporter aux conditions dans lesquelles était alors placée l’Antiquité ; la science y est déjà fort avancée, si l’on considère le nombre prodigieux des faits bien observés ; mais le langage de la science n’a pas encore la rigueur et la clarté qu’il a pu acquérir aujourd’hui, après tant de travaux accumulés par les siècles. On doit en outre se rappeler la mort prématurée d’Aristote, qui ne lui a pas permis de mettre la dernière main à ses écrits. Mais son style, malgré les justes critiques dont il peut être l’objet à certains égards, a très souvent une grandeur et une netteté que personne n’a dépassées, même dans du temps beaucoup plus favorisés que le sien. Voir sur ces questions les préfaces à l’Histoire des Animaux, p. CXII ; et au Traité des Parties, p. V, et D. p. CXCIX ; Voir aussi la préface au présent Traité de la Génération des Animaux, où la question a été traitée de nouveau.