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Plein de respect et de piété pour cette grande idée, que personne, jusqu’à lui, n’avait conçue aussi nettement, Xénophane écarte avec le même soin les fictions gracieuses, mais dégradantes, des poètes et l’anthropomorphisme grossier du vulgaire. Dieu n’a ni les vices, ni la figure des mortels et des misérables humains qui le font à leur image. Dans l’univers, il n’est rien qui lui ressemble ; car pourquoi le semblable serait-il créateur plutôt que créé ? Dieu, qui ne peut venir d’un être qui lui ressemblerait, peut venir bien moins encore de ce qui serait au dessous de lui. Il ne vient donc de rien ; il est nécessairement éternel. Par une conséquence non moins nécessaire, il est tout-puissant. S’il y avait plusieurs dieux, ces dieux seraient plus forts ou plus faibles les uns que les autres. Il n’y aurait donc plus de Dieu ; car le propre de Dieu, c’est de dominer tout et de n’être dominé par qui que ce soit. Éternel, tout-puissant, Dieu est un ; car s’il avait à côté de lui des rivaux, il ne pourrait accomplir ses décrets et sa volonté souveraine.

Voilà, dans la théodicée de Xénophane, quelques principes excellents, que la théologie chrétienne n’a pas repoussés, et qu’elle a même soigneusement recueillis. Mais ici la vue de Xénophane se trouble, ce qui. n’a rien de surprenant ; et voulant pénétrer dans la nature plus intime de Dieu, il fait des faux