Page:Aristote - Politique, Thurot, 1824.djvu/88

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

sur ce sujet, comme sur tous les autres, c’est d’observer les choses dans leur origine et dans leur développement.

4. Or, c’est d’abord une nécessité que des êtres qui ne sauraient exister l’un sans l’autre, comme, l’homme et la femme, s’unissent par couples, en vue de la génération. Et ce n’est pas en eux l’effet d’une détermination réfléchie ; mais la nature leur inspire, comme à tous les autres animaux, et même aux plantes, le désir de laisser après eux un autre être qui leur ressemble. Il y a aussi, par le fait de la nature et pour le but de la conservation des espèces, un être qui commande, et un être qui obéit ; car celui que son intelligence rend capable de prévoyance a naturellement l’autorité et le pouvoir de maître : celui qui n’a que les facultés corporelles pour l’exécution de ce qu’on lui commande, doit naturellement obéir et servir ; en sorte que l’intérêt de l’esclave est le même que celui du maître.,

5. Ainsi la destination de la femme diffère de celle de l’esclave par le fait même de la nature, qui ne laisse rien de vague et d’indécis dans ses productions, rien qui accuse une mesquine impuissance, comme ces couteaux que fabriquent les couteliers de Delphes[1]. Chaque être, parmi ceux qu’elle


  1. Il n’est pas facile de deviner ce que c’était que ce couteau delphien, dont Aristote ne parle que dans ce seul endroit de ses ouvrages, et si le Δελφικὴ μάχαιρα est la même chose que l’instrument appelé Ξιφομάχαιρα par le poète comique Théopompe, comme l’a conjecturé Schneider. Quoi qu’il en soit, notre philosophe veut dire ici que la nature ne fait point de productions qui soient à plusieurs fins, comme les couteaux qu’on fabriquait à Delphes, ou comme les ῥοελισκολύχνια, dont il est question 1. IV, c. 12, § 5. Mr Coray.