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que cette force ne doit jamais être confiée, sans condition et sans une sévère responsabilité, à un individu, à une famille, ou à une portion quelconque, même la plus nombreuse, de la société, à l’exclusion de quelque autre partie que ce soit (1) : car leurs méditations sur la nature humaine leur avaient fait reconnaître la tendance constante de l’intérêt privé ou personnel, et sa force prédominante dans l’immense majorité des individus.

Ils en conclurent donc que c’était à la loi de prescrire les conditions d’après lesquelles tout dépositaire de la force publique userait de l’autorité qui lui serait confiée, et que cette loi devait être, comme toute autre loi, l’expression des besoins, des intérêts, des sentiments, sinon de tous, au moins du plus grand nombre des membres de la

(1) Cette force, destinée à défendre les citoyens contre les attaques des ennemis extérieurs, et à les protéger contre toute atteinte portée à la sûreté des personnes et des propriétés, soit par des individus isolés, soit par des réunions on coalitions d’hommes violents et injustes, est nécessairement irrésistible pour chaque citoyen. Si donc elle est employée à les dépouiller de leurs droits, si elle est employée illégalement contre leur sûreté ou leur liberté, elle devient le plus redoutable des fléaux. À la vérité cet abus qu’on en fait, tend incessamment à la détériorer et à l’affaiblir : il la rend impuissante, d’abord contre les ennemis du dehors, puis contre les révolutious ou les conspirations qui peuvent se former au-dedans ; mais ce n’est pas un remède au mal que souffre la société, ce n’est qu’un changement de calamités. PRÉLIMINAIRE. ljx