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moins, et qu’il y eût une faute contre l’art dans lequel rentre la chose en question, ce ne serait pas bon ; car il faut, si c’est possible, ne commettre absolument aucune faute sur aucun point.

VIII. B. De plus, sur lequel des deux points porte la faute ? sur quelque détail inhérent à l’art, ou bien sur quelque autre fait accidentel ? Car elle est moins grave si le poète a ignoré que la femelle du cerf n’a pas de cornes[1] que s’il ne l’a pas représentée suivant les principes de l’imitation.

IX. C. Outre cela, si l’on reproche le manque de vérité, on répondra qu’on a voulu rendre les objets tels qu’ils devraient être. C’est ainsi que Sophocle disait que lui-même représentait les hommes tels qu’ils doivent être, et Euripide tels qu’ils sont. Voilà comment il faut réfuter cette critique.

X. D. Si l’on dit qu’ils ne sont représentés d’aucune des deux façons, c’est ainsi (dira-t-on) que les voit l’opinion commune ; par exemple, ce qui se dit sur les dieux. Car il ne serait peut-être pas mieux parler de telle façon, ni possible de dire la vérité, mais on en parle un peu au hasard, comme dit Xénophane.

XI. E. Ce n’est pas l’opinion commune[2], et ce n’est peut-être pas le mieux, mais c’est la réalité. Exemple, ce vers sur les armes :

Leurs lances étaient plantées droit sur le bout[3].

En effet, c’était l’usage alors, comme font encore aujourd’hui les Illyriens.

XII. F. Quant à la question de savoir (si) la parole ou l’action d’un personnage est convenable ou non, il

  1. Pindare : Χρυσοκέρων ἔλαφον θήλειαν. (Olymp., III, 52.)
  2. Autre réponse aux critiques.
  3. Iliade, X, 153.