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des autres poètes, a celui-ci, qu’il a bien compris cela, soit par sa connaissance de l’art, soit par un génie naturel. En composant l’Odyssée, il n’a pas mis dans son poème tous les événements arrivés à Ulysse, tels, par exemple, que les blessures reçues par lui sur le Parnasse, ou sa simulation de la folie au moment de la réunion de l’armée. De ces deux faits, l’accomplissement de l’un n’était pas une conséquence nécessaire, ou même probable de l’autre ; mais il constitua l’Odyssée en vue de ce que nous appelons l’ « unité d’action ». Il fit de même pour l’Iliade.

IV. Il faut donc que, de même que dans les autres arts imitatifs, l’imitation d’un seul objet est une, de la même manière la fable, puisqu’elle est l’imitation d’une action, soit celle d’une action une et entière, et que l’on constitue les parties des faits de telle sorte que le déplacement de quelque partie, ou sa suppression, entraîne une modification et un changement dans l’ensemble ; car ce qu’on ajoute ou ce qu’on retranche, sans laisser une trace sensible, n’est pas une partie (intégrante) de cet ensemble.


CHAPITRE IX


Comparaison de l’histoire et de la poésie. — De l’élément historique dans le drame. — Abus des épisodes dans le drame. — De la péripétie[1], considérée comme moyen dramatique.

I. Il est évident, d’après ce qui précède, que l’affaire du poète, ce n’est pas de parler de ce qui est arrivé, mais bien de ce qui aurait pu arriver et des choses possibles, selon la vraisemblance ou la nécessité.

  1. Περιπέτεια. M. Egger traduit ce mot quelquefois, et ici notamment, par surprise.