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En effet, ceux qui se mettent à pleurer portent les mains à leurs yeux. Présente-toi, tout d’abord, sous tel caractère, afin que l’on considère ton adversaire comme ayant tel autre caractère ; seulement, fais-le sans le laisser voir. La preuve que c’est facile est à prendre dans ceux qui annoncent une nouvelle. Sans en savoir rien encore, nous nous en faisons déjà pourtant une certaine idée. Il faut placer la narration sur plusieurs points de son discours et, quelquefois même, au début.

XI. Dans la harangue, il y a très peu de place pour la narration, parce que l’on n’a rien à raconter quand il s’agit de l’avenir ; mais, s’il y a narration, elle prendra son texte dans des événements passés, afin que, par ce souvenir, on conseille mieux sur les faits ultérieurs, soit qu’il serve à incriminer ou à louanger ; et alors on ne fait plus acte de conseiller. Mais, si l’opinion avancée est incroyable, il faut promettre de donner immédiatement ses motifs et faire appel au jugement de qui l’auditoire voudra désigner. Citons, par exemple, la Jocaste de Carcinus, dans son Œdipe, qui promet toujours (des indications), quand l’interroge celui qui cherche son fils, et encore l’Hémon de Sophocle[1].


CHAPITRE XVII


Des preuves.


I. Les preuves doivent être, nécessairement, démonstratives ; or il faut démontrer, puisque la controverse a lieu sur quatre points [2], en portant la démonstration

  1. Antig., vers 635 ; alias 679.
  2. 1o Non-existence du fait, — 2o Fait existant, mais non nuisible. — 3o Fait existant, nuisible, mais moins qu’on ne l’a dit. — 4o Fait existant, nuisible, nuisible autant qu’on l’a dit, mais non injuste.