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VII. Des quatre sortes de métaphores[1], celles qui se font le plus goûter sont les métaphores par analogie. C’est ainsi que Périclès a dit : « La jeunesse qui a péri dans la guerre a laissé un vide aussi sensible dans la cité que si, de l’année, on retranchait le printemps[2]. »

Leptine, parlant en faveur des Lacédémoniens, a dit qu’il ne fallait pas permettre que la Grèce fût réduite à perdre un œil[3]. Céphisodote[4], voyant Charès insister pour rendre ses comptes au moment de la guerre olynthienne, dit, pour exprimer son indignation, « qu’il tentait de rendre ses comptes en tenant le peuple dans un four. » Et, pour exhorter les Athéniens à faire une expédition en Eubée : « Il faut, dit-il, après nous être approvisionnés, lancer le décret de Miltiade[5]. » Iphicrate, sur ce que les Athéniens avaient traité avec ceux d’Épidaure et les habitants de la côte, s’écriait dans son indignation : « Ils se sont ôté à eux-mêmes les approvisionnements de guerre. » Pitholaüs appelait la trière paralienne[6] «la massue du peuple », et Sestos « le marché au blé du Pirée ». Périclès voulait qu’on dé-

  1. Elles sont énumérées dans la Poétique, ch. XXI. La métaphore est : 1o Le transport du genre à l’espèce ; 2o de l’espèce au genre ; {ordinal|3}} de l’espèce à une autre espèce ; 4o celui d’un terme à son corrélatif, ce qui est la métaphore par analogie, dont Aristote va parler.
  2. Cp. plus haut (l. I, ch. VII, § 34), où la même pensée est rapportée en d’autres termes. Il y a dans Hérodote (VII, 162) une métaphore ou plutôt une comparaison analogue. — Athénée ({{rom|III}, p. 99) attribue à Démade ce mot que « les éphèbes étaient le printemps du peuple. »
  3. Cp. Plut Préceptes politiques, ch. VI. — (Voir l’éd. Spengel.)
  4. C’est l’orateur athénien. Dobree, et non le disciple d’Isocrate.
  5. Décret ayant pour objet l’expédition des Grecs contre Xerxès. Cp. Démosthène, Fausse ambassade, § 303. — Voir Dobree, Adversaria critica, p. 138.
  6. L’une des deux trières consacrées (l’autre était la Salaminienne), lesquelles n’étaient mises à l’eau que dans les circonstances graves.