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qu’on y trouve. De là vient que les poètes introduisent des expressions telles que « le chant sans cordes, le chant sans lyre[1] ». Et ils les obtiennent au moyen des formes privatives. Ce procédé fait bon effet dans les métaphores qui reposent sur l’analogie ; comme, par exemple, de dire que (le son de) la trompette est un chant sans lyre.


CHAPITRE VII


Sur la convenance du style.


I. L’élocution sera conforme à la convenance si elle rend bien les passions et les mœurs, et cela dans une juste proportion avec le sujet traité.

II. Il y aura juste proportion si l’on ne parle ni sans art sur des questions d’une haute importance, ni solennellement sur des questions secondaires, et pourvu que l’on n’adapte pas un terme fleuri[2] au nom d’une chose ordinaire ; sinon, la comédie apparaît, et c’est ce qui arrive à Cléophon[3] ; il affectait certaines expressions dans le genre de celle-ci : « Vénérable figuier. »

III. L’élocution rendra l’émotion d’un homme courroucé s’il s’agit d’un outrage. A-t-on à rappeler des choses impies et honteuses ? il faudra s’exprimer en termes (respectivement) sévères et réservés, — Des choses louables ? en termes admiratifs ; — des choses qui excitent la pitié ? dans un langage humble ; et ainsi du reste.

  1. Ἄχορδος est dans Théognis cité par Démétrius, § 85. Ἄλυρος est dans Eurip., Iph, en Taur., v. 144.
  2. Littéralement : un ornement.
  3. Poète tragique d’Athènes.