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pleins de courage, il nomme, par métaphore, Achille un lion.

II. On emploie aussi l’image dans la prose ; seulement c’est rare, attendu qu’elle est propre à la poésie. On place les images de la même manière que la métaphore, car ce sont des métaphores qui se distinguent des autres par la différence qu’on vient d’indiquer.

III. Les images sont, par exemple, ce que dit Androtion[1] sur Idrée[2] : qu’il ressemblait à de petits chiens qu’on vient de déchaîner ; que ceux-ci se jettent sur les gens et les mordent ; que, tout de même, Idrée, sortant de prison, est inabordable. C’est encore ainsi que Théodamas comparait Archidamus à Euxène, ignorant en géométrie, et, d’après la même relation, Euxène sera un Archidamus géomètre[3] Telle encore la comparaison qui figure dans la République de Platon [4] et d’après laquelle ceux qui dépouillent les morts ressemblent à de petits chiens qui mordent les pierres qu’on leur jette, sans toucher ceux qui les lancent. Telle encore cette image, relative au peuple, qu’il est dans la situation d’un pilote à la main solide, mais qui aurait l’oreille dure[5]. Telle l’image relative aux vers des poètes, à savoir : qu’ils ressemblent aux jeunes gens sans beauté ; ceux-ci quand ils n’ont plus la leur de la jeunesse, ceux-là quand ils sont démembrés, ne sont plus reconnaissables[6]. Telle l’image de Périclès, visant les Samiens : « Ils ressemblent, disait-il, aux

  1. Disciple d’Isocrate.
  2. Idrée parait être le frère de Mausole, roi de Carie, dont parle Isocrate, Discours à Philippe, § 103.
  3. D’après la conjecture très plausible de Vettori, cet Euxène n’avait pour lui que la profonde connaissance de la géométrie.
  4. Républ., liv. V, p. 469.
  5. Républ., liv. VI, p. 488.
  6. Républ., liv. X, p. 601.