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un être divin, de ne pas la pleurer ; ou, s’ils en faisaient un être humain, de ne pas lui sacrifier[1].

XXVIII. Un autre lieu, c’est d’accuser ou de se défendre en alléguant les erreurs commises. Par exemple, dans la Médée de Carcinus, d’une part on accuse celle-ci d’avoir tué ses enfants, en alléguant qu’elle ne les fait pas paraître ; car elle avait commis la faute de les renvoyer. De son côté, elle allègue, pour se défendre, qu’elle n’aurait pas tué ses enfants, mais Jason, car elle aurait fait une faute en n’accomplissant pas cette action à supposer qu’elle eût accompli l’autre. C’est là un lieu d’enthymème et une variété qui constitue tout le premier traité de Théodore.

XXIX. Un autre se tire du nom, comme, par exemple, dans Sophocle :

Il est significatif le nom que porte Sidéro[2],

et comme on a l’habitude d’en user dans les louanges des dieux.

C’est ainsi que Conon appelait Thrasybule « l’homme à la forte volonté [3] » ; qu’Hérodicos disait à Thrasymaque : « Tu es toujours un combattant résolu[4] » et à Polus : « Tu es toujours un poulain[5] ; » et en parlant de Dracon le législateur : « Ses lois ne sont pas d’un homme, mais d’un dragon, » à cause de leur sévérité. C’est ainsi que l’Hécube d’Euripide dit d’Aphrodite :

Oui, c’est à bon droit que le nom de cette déesse a le même commencement que celui de la folie [6] ;
  1. Dans Plutarque (De la superstition, 36), Xénophane donne ce conseil aux Égyptiens à propos de leurs divinités.
  2. Comme qui dirait la femme de fer.
  3. Θρασύβουλος.
  4. Θρασύμαχος
  5. Πῶλος
  6. ᾿Αφροσύνη. — Troyennes, 990.