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affaire un choix d’arguments qui portent sur les éventualités admissibles et sur les faits le plus en rapport avec la circonstance.

XI. Lorsqu’il s’agit d’incidents qui surviennent à l’improviste, il faut chercher (ses arguments) par la même méthode, en envisageant non pas ceux d’une application indéterminée, mais ceux qui ont trait au sujet même traité dans le discours et en se renfermant, le plus souvent, dans les termes qui touchent de plus près à l’affaire. D’abord, plus les faits actuels qu’on peut alléguer sont nombreux, plus la démonstration devient facile ; ensuite, plus ils tiennent de près à l’affaire, plus ils s’y rapportent, moins on s’égare dans les généralités.

XII. J’appelle « généralité[1] » l’éloge d’Achille fondé sur ce que c’était un homme, un demi-dieu, un de ceux qui firent l’expédition contre Ilion ; car ces traits s’appliquent tout autant à beaucoup d’autres, de telle sorte que l’auteur d’un tel éloge ne dirait là rien de plus en faveur d’Achille que de Diomède.

J’appelle au contraire « particularités » ce qui n’est arrivé qu’au seul Achille, par exemple, d’avoir tué Hector, le principal guerrier des Troyens, et Cycnos, qui sut empêcher toute l’armée ennemie de sortir (des vaisseaux), vu qu’il était invulnérable[2] , et d’avoir pris part à l’expédition dans la première jeunesse et sans être lié par un serment ; enfin toutes les autres considérations de même nature. C’est là la première manière de choisir les arguments, et tel est le premier (syllogisme) topique.

XIII. Parlons maintenant des éléments des enthy-

  1. On pourrait presque traduire : « banalité. »
  2. Cp. Ovide, Métamorph., xii, v. 64 et suiv.