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III. De même ceux qui obtiennent des distinctions exceptionnelles à quelque titre particulier, et principalement pour leur sagesse, ou pour leur bonheur. Les ambitieux sont aussi plus portés à l’envie que les gens dépourvus d’ambition. De même encore ceux qui affectent d’être des sages, car leur ambition est tournée du côté de la sagesse ; et, d’une manière générale, ceux qui recherchent la renommée en quelque chose sont envieux par rapport à cette même chose ; et encore les gens d’un petit esprit, car tout leur semble d’une grande importance.

IV. Quant aux motifs de l’envie, nous avons déjà parlé de ceux qui sont des avantages[1]. Les travaux dans lesquels on recherche la renommée ou les honneurs et pour lesquels on a soif de gloire, les événements heureux qui nous arrivent, presque tout cela laisse une place à l’envie et, principalement, ce qui est un objet de convoitise, ou ce que nous croyons nous être dû, ou encore les choses dont la possession contribue quelque peu à augmenter notre supériorité, on à diminuer notre infériorité.

V. On voit clairement aussi à qui l’on porte envie : nous l’avons expliqué du même coup ; c’est-à-dire que l’on porte envie à ceux que rapprochent de nous le temps, le lieu, l’âge, le genre de renommée. De là, ce vers :

La parenté connaît, elle aussi, le sentiment de l’envie[2].

L’envie atteint encore ceux avec qui l’on est en rivalité, car on est en rivalité avec ceux dont nous venons de parler, tandis que ceux qui existaient il y a des

  1. Chap. IX, § 3.
  2. Le scoliaste attribue ce vers à Eschyle.