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ou chez qui nous voulons exciter l’émulation, sans devenir pour eux un objet d’envie, nous les aimons, ou bien nous tenons à nous en faire des amis.

XXV. De même ceux avec lesquels nous coopérons à une bonne action, pourvu qu’il ne doive pas en résulter pour nous des maux plus graves.

XXVI. Ceux qui donnent une égale affection, que l’on soit absent ou présent. Voilà pourquoi tout le monde aime ceux qui ont cette constance envers ceux de leurs amis qu’ils ont perdus. On aime, en général, ceux qui aiment vivement leurs amis et qui ne les abandonnent pas ; car, entre tous les gens de mérite, ce sont ceux qui ont le mérite de savoir aimer que l’on aime le plus.

XXVII. Ceux qui sont sans feinte avec nous [1]. À cette classe appartiennent ceux qui nous découvrent leurs côtés faibles. En effet, nous avons dit que, devant nos amis, nous ne rougissons pas de ce qui est contre nous en apparence. Si donc celui qui en rougit n’aime point ; celui qui n’en rougit point ressemble à quelqu’un qui aimerait. De même ceux qui ne donnent aucun sujet de crainte et sur qui nous pouvons nous reposer ; car nul être n’aime celui qui inspire de la crainte.

XXVIII. Quant aux diverses formes de l’amitié, ce sont la camaraderie, la familiarité, la parenté et toutes choses analogues à celles-là.

XXIX. Ce qui nous porte à l’affection, ce sont la reconnaissance, un service rendu sans qu’on l’ait demandé et, une fois rendu, non divulgué ; autrement, on donne à croire qu’il a été rendu dans un intérêt personnel, et non dans l’intérêt d’un autre.

XXX. Au sujet de l’inimitié et de la haine, il est évi-

  1. Nous lisons αὐτοὺς, avec Spengel. – 2. § 23.