Page:Aristote - Poétique et Rhétorique, trad. Ruelle.djvu/202

Cette page a été validée par deux contributeurs.

de la cause. Il faudra encore avoir égard à l’utilité du contrat, voir s’il peut en quelque façon être contraire à la pensée des juges, et peser toutes les autres circonstances de cette sorte ; car tous ces points de vue sont également à considérer.

XXVI. La torture est une espèce de témoignage. Elle semble porter en elle la conviction, attendu qu’il s’y ajoute une contrainte. Il n’est donc pas difficile de comprendre ce qui s’y rapporte et ce qu’il convient d’en dire. Lorsque les tortures nous sont favorables, il y a lieu d’insister sur ce point que ce sont les seuls témoignages véritables. Si elles sont contre nous, ou en faveur de l’adversaire, on en pourra détruire le caractère véridique en plaidant contre le principe même de la torture. Les gens contraints par la torture, dira-t-on, ne disent pas moins des mensonges que des choses vraies, les uns persistant à ne pas dire toute la vérité, les autres mentant sans difficulté pour abréger leurs souffrances. Il faut, à l’appui de ces arguments, être en état de citer des exemples positifs, bien connus des juges[1].

XXVII. En ce qui concerne les serments, il faut distinguer quatre cas. On le défère et on l’accepte ; on ne fait ni l’un ni l’autre ; on fait l’un et non pas l’autre ; autrement dit, on le défère sans l’accepter, ou bien on l’accepte sans le déférer. Il y a, en outre, le cas où le serment a été prêté par telle des deux parties ou par l’autre.

XXVIII. Pour ne pas le déférer (on allègue) que les hommes se parjurent facilement, et cette autre raison que celui qui a prêté serment n’a pas à s’acquitter, au lieu que ceux qui n’ont pas juré, on pense

  1. Voir, sur ce passage, une observation de M. E. Havet (Et. sur la rhétor. d’Arist., p. 71) et la rectification de M. N. Bonafous (Rhétor. d’Arist., p. 415).