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cours de flûte, en joutes oratoires (παιδαιαὶ ἐριστικαί), car il en résulte souvent une occasion de vaincre : de même dans le jeu d’osselets, de paume, de dés, d’échecs. Il en est de même des succès remportés dans les jeux sérieux. Les uns deviennent agréables quand on y est exercé, d’autres le sont du premier coup ; telle, par exemple, la chasse, et généralement tout exercice ayant pour objet l’attaque des bêtes fauves. En effet, partout où il y a lutte, il y a aussi victoire ; et c’est pour cela que la plaidoirie et la discussion sont des choses agréables pour ceux qui en ont l’habitude et la faculté.

XVI. Les honneurs et la gloire sont au nombre des choses les plus agréables, parce que chacun y puise l’idée qu’il a telle valeur et qu’il est un personnage important ; et c’est ce qui arrive surtout lorsque ceux qui parlent de nous (dans ce sens) nous paraissent dire la vérité. Or sont dans ce cas ceux qui nous approchent, plutôt que ceux qui sont loin de nous ; nos familiers, nos connaissances, nos concitoyens, plutôt que les étrangers, et ceux qui existent actuellement plutôt que la postérité ; les hommes de sens, plutôt que les hommes irréfléchis ; le grand nombre, plutôt que la minorité ; car le témoignage de ces catégories est présumé plus vrai que celui des catégories contraires. En effet, ceux pour qui l’on professe un grand dédain, tels que les enfants ou les bêtes, on n’a aucun souci de leur estime ou de leur opinion, du moins pour cette opinion elle-même ; mais, si l’on en prend souci, c’est pour quelque autre raison.

XVII. Avoir un ami, voilà encore une des choses agréables : d’une part, donner son amitié est chose agréable, car il n’est personne qui aime le vin et ne trouve du plaisir à en boire ; d’autre part, être aimé