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personne en cause, plutôt que celle qui l’est absolument ; le possible vaut mieux que l’impossible, car le possible peut profiter à tel ou tel, et l’impossible, non sont préférables aussi les choses comprises dans la fin de la vie[1], car ce qui est une fin vaut mieux que ce qui n’est qu’un acheminement vers cette fin.

XXXVI. Ce qui tient à la réalité vaut mieux que ce qui tient à l’opinion. Définition de ce qui tient à l’opinion ; c’est ce que l’on ne serait pas disposé à faire si l’action devait rester ignorée. C’est pourquoi, aussi, on trouvera préférable de recevoir un avantage plutôt que de le procurer, car on sera disposé à recevoir cet avantage, dût-il être reçu en secret, tandis qu’on ne semblerait guère disposé à procurer un avantage dans ces conditions.

XXXVII. Les choses dont on veut l’existence réelle valent mieux que celles auxquelles on ne demande que l’apparence. De là le proverbe : « C’est peu de chose que la justice, » vu que l’on tient plus à paraître juste qu’à l’être ; mais il n’en est pas ainsi de la santé.

XXXVIII. De même une chose plus utile à plusieurs fins, comme ce qui l’est à la fois pour vivre et pour vivre heureux, pour le plaisir et pour les belles actions. C’est ce qui donne à la richesse et à la santé l’apparence d’être les plus grands biens, car ces deux avantages comprennent tous les autres.

XXXIX. De même encore ce qui se fait en même temps, avec moins de peine et avec plaisir ; car il y a là deux choses plutôt qu’une seule, en ce sens que le plaisir est un bien, et l’absence de peine en est un autre.

XL. Deux choses étant données et s’ajoutant à une même quantité, ce qui est préférable, c’est celle qui rend la somme plus grande. Ce sont encore les

  1. Le bonheur.