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II. Considérons, à titre d’exemple, ce que c’est, à proprement parler, que le bonheur et de quoi procèdent les parties qui le composent ; car c’est sur le bonheur, ainsi que sur les moyens qui nous y conduisent ou les obstacles qui nous en détournent, que portent tous nos efforts pour exhorter ou pour dissuader, attendu qu’il faut que l’on fasse les actions qui préparent le bonheur ou quelqu’une de ses parties, ou qui rendent celle-ci plus grande ; mais les choses qui détruisent le bonheur, ou l’entravent, ou produisent ce qui lui est contraire, il faut qu’on ne les fasse point.

III. Le bonheur sera donc une réussite obtenue avec le concours de la vertu, le fait de se suffire à soi-même, ou la vie menée très agréablement et avec sûreté, ou, encore, la jouissance à souhait des possessions et des corps, avec faculté de les conserver et de les mettre en œuvre. En effet, un ou plusieurs de ces biens, presque tout le monde convient que c’est là le bonheur.

IV. Maintenant, si c’est là le bonheur, il aura nécessairement pour parties constitutives la noblesse, un grand nombre d’amis, l’amitié des gens honnêtes, la richesse, une descendance prospère, une belle vieillesse ; de plus, les bonnes qualités du corps, telles que la santé, la beauté, la vigueur, la grande taille, la faculté de l’emporter dans les luttes agonistiques ; la renommée, l’honneur, la bonne fortune, la vertu, ou bien encore ses parties, la prudence, le courage, la justice et la tempérance. En effet, on se suffirait très amplement à soi-même si l’on pouvait disposer et des avantages que l’on possède en soi, et de ceux du dehors ; car il n’y en a pas d’autres après ceux-là. Ceux que l’on possède en soi, ce sont