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plété le sien par des articles publiés en 1861 dans la Revue archéologique. Nous rapporterons quelques-unes de leurs appréciations en ce qu’elles auront de relatif soit à la méthode générale du Stagirite, soit aux deux traités qu’on va lire.

Il est bon de déterminer tout d’abord la différence du style d’Aristote et de celui de Platon. « L’un exprime ses idées sous la forme du dialogue, dans un style plein d’imagination, de grâce et de sensibilité ; l’autre s’adresse directement au lecteur, ne parle qu’à son intelligence et disserte dans un style d’une aridité toute géométrique, sans couleur et sans passion (Thurot, Études sur Aristote, p. 141). « S’il exprime (Aristote) souvent sa pensée avec une précision qui en orne la profondeur, la rédaction de ses ouvrages ferait penser qu’il les a écrits plutôt pour lui que pour le public, tant elle est parfois négligée et rebutante » (l. c., p. 150). Du reste, Aristote, M. Thurot le rappelle, avait écrit d’autres ouvrages pour le plus grand nombre ; ils avaient la forme du dialogue. — « Le mot dialectique n’a pas le même sens pour Aristote et pour Cicéron. Il est synonyme de logique pour Cicéron. Il signifie l’art de disputer pour Aristote » (l. c., p. 264). Cicéron, qui applique souvent le mot suavitas au style d’Aristote (voir Thurot, ouvrage cité, p. 273, note 1), est meilleur critique lorsqu’il écrit : Quis Aristotale nervosior, Theophrasto dulcior ? (Brutus, 31, 121.) Nous nous sommes efforcé de conserver les saillies nerveuses de ce style où la douceur du langage le cède toujours à la rigueur de l’observation, à la force et à la profondeur de la pensée.

On n’a jamais élevé de doute sérieux sur l’authenticité de la Poétique et de la Rhétorique. Nous n’avons donc pas à nous arrêter sur ce point.


Les détails qui vont suivre concernent particulièrement la Poétique. Il ne faut pas s’étonner que nous l’ayons placée avant la Rhétorique, contrairement à l’usage suivi dans les éditions générales d’Aristote. Elle est citée dans ce dernier ouvrage (III, I, 10). Les manuscrits connus qui la renferment sont conservés à Paris, à Rome, à Venise, à