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éléments dont il est composé n’existent pas, il n’a lui-même, à ce qu’il semble, qu’une existence précaire. Quant à ce qu’on appelle le présent, l’instant, ce n’est pas, à proprement parler, une partie du temps ; car le temps ne se compose pas d’instants. L’instant est la limite du temps, et c’est lui qui sépare le passé de l’avenir. Mais il est sans cesse autre et perpétuellement différent, de telle sorte que son existence est moins réelle encore que celle du passé, qui a cessé d’être, et celle du futur, qui n’est pas et qui seulement doit être plus tard. Les instants se succèdent ; mais ils ne coexistent jamais ; ils ne tiennent pas plus les uns aux autres que les points ne tiennent aux points dans la ligne. L’instant meurt au moment même où il naît. Que si l’on prétendait que c’est toujours le même instant qui subsiste et demeure éternellement, alors les faits qui se sont passés il y a dix mille ans, et ceux qui se passent aujourd’hui seraient contemporains ; et les idées d’antériorité et de postériorité seraient absolument supprimées.

Aristote se livre à cette discussion sur la notion du temps, non pas pour en nier l’existence, mais pour montrer seulement combien il est difficile de s’en faire une juste idée. Cette perplexité du philosophe