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le mouvement qu’il a reçu. Quant à l’intermédiaire par lequel le moteur donne le mouvement, il faut à la fois qu’il meuve et qu’il soit mu. En effet, cet intermédiaire doit subir le même changement que le mobile, puisqu’il coexiste avec lui et qu’il est dans les mêmes conditions, c’est-à-dire que, pour mouvoir le mobile, il faut qu’il soit mu lui-même, et qu’en ce sens il soit mobile. C’est ce qu’on peut voir clairement dans les corps qui en déplacent d’autres dans l’espace ; ils doivent, dans une certaine mesure, se toucher l’un l’autre pour que le déplacement soit possible. Après le mobile et l’intermédiaire, reste enfin le moteur qui est immobile, et après lequel il n’y a plus d’intermédiaire qui transmette le mouvement. Mais, comme de ces trois termes nous voyons que le dernier reçoit le mouvement qu’il n’a pas par lui-même, et que l’intermédiaire est mu par une cause étrangère également, sans avoir non plus en lui le principe de son action, il est très rationnel, pour ne pas dire nécessaire, de penser que le troisième terme, qui est le moteur, doit donner le mouvement tout en restant lui-même immobile.

Cette immobilité nécessaire du moteur explique en un point et justifie le système d’Anaxagore, quand il prétend que l’Intelligence, dont il fait l’ordonnatrice de l’univers, est à l’abri de toute affection et de tout mélange, de quelque nature que ce soit. Il n’en peut pas être autrement, du moment qu’il place le mouvement du principe dans l’Intelligence ; car c’est uniquement en étant elle-même immobile qu’elle peut créer le mouvement ; et elle ne peut dominer le monde qu’en ne s’y mêlant point.

Nous avons supposé plus haut que le mouvement du moteur pouvait être accidentel ou nécessaire, et nous venons