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Ainsi donc, si l’on suppose les moteurs et les mobiles éternels, il est impossible que le mouvement ne le soit pas comme eux. Mais voici une autre conséquence absurde qu’il convient de ne pas omettre : c’est que s’il n’y a pas de mouvement, il n’y a pas de temps non plus ; car, comment concevoir qu’il puisse y avoir antériorité et postériorité, s’il n’y a pas de temps ? Et comment y aurait-il du temps, s’il n’y a pas de mouvement ? Le temps n’est que le nombre du mouvement, ou même, on peut dire, un mouvement d’une certaine espèce ; et du moment que le temps est éternel, le mouvement est éternel ainsi que lui. Tous les philosophes en général, si l’on en excepte peut-être un seul, semblent unanimes dans leurs théories sur le temps ; tous le regardant comme incréé ; et c’est même en soutenant que le temps n’a point été créé, que Démocrite essaie de démontrer que l’univers n’a jamais pu l’être. Le seul philosophe que j’exceptais tout à l’heure, c’est Platon qui a soutenu que le temps a été créé ; selon lui, le temps est né avec le ciel : car, à son avis, le ciel aussi a pris naissance. Si donc l’existence et la conception même du temps sont impossibles sans la notion et l’existence de l’instant, et si l’instant est une sorte de moyen terme réunissant en lui un commencement et une fin, le commencement de l’avenir, et la fin du passé, il faut nécessairement que le temps soit éternel ; car l’extrémité du temps que l’on considère est toujours dans un certain instant, puisque la seule partie saisissable du temps est l’instant lui-même ; et comme l’instant est à la fois commencement et fin, il est clair qu’il y a toujours du temps des deux côtés de l’instant, soit avant, soit après ; or, du moment que le temps existe