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peut appliquer aux surfaces du corps la remarque qu’on appliquait plus haut au corps lui-même : et là où étaient d’abord les surfaces de l’eau, sont actuellement les surfaces de l’air, qui en ont pris la place. Or, les surfaces se composent de points, et il n’y a pas de différence possible entre le point et le lieu du point. Par conséquent, si le lieu du point est le point lui-même, les surfaces qui se composent de points seront dans le même cas, et le lieu des surfaces ne sera pas autre que les surfaces elles-mêmes ; l’espace alors n’est absolument rien indépendamment des corps qu’il est supposé renfermer. Qu’est-ce donc que l’espace réellement, et comment faut-il le considérer ? Avec la nature qu’il a, on ne peut en faire ni un élément, ni un composé d’éléments, soit naturels soit incorporels. Il a de la grandeur sans toutefois être un corps. Or, les éléments des corps sensibles sont des éléments eux-mêmes ; et des éléments purement intelligibles n’arrivent jamais à former un corps et une grandeur réelle.

A d’autres points de vue, on peut se faire sur l’espace des questions non moins embarrassantes. Ainsi, comment l’espace pourrait-il être une cause à l’égard des choses ? A quelle espèce de cause peut-ou le rapporter ? On ne découvre en lui aucune des quatre causes que nous avons comptées. Il ne peut être regardé comme la matière des êtres, puisque aucun être n’est composé d’espace ; il n’est pas davantage la forme et l’essence des choses ; il n’est pas non plus leur fin, et il n’est pas leur moteur. Ainsi il n’est cause d’aucune manière. Ajoutez que si l’espace doit être rangé au nombre des êtres, on peut demander : Où sera-t-il placé en tant qu’être ? Et alors le doute de Zénon, qui nie l’espace, attendu qu’il ne sait où le mettre,