Page:Aristote - Physique (Saint-Hilaire), 1862, Tome 1.djvu/278

Cette page n’a pas encore été corrigée

infini ; car le corps est défini : Ce qui est limité par une surface. Dès lors, la raison ne peut pas plus concevoir un corps infini que les sens ne peuvent le percevoir. Mais le nombre lui-même considéré dans les choses n’est pas infini, de même qu’il l’est quand on le considère abstraitement. Le nombre dans ce cas n’est que ce qui est numérable ; et puisqu’on peut toujours nombrer le numérable, il s’ensuivrait qu’on pourrait ainsi parcourir et épuiser l’infini. Voilà pour les arguments rationnels.

Physiquement, les arguments ne sont pas moins forts, et ils prouvent que ce prétendu corps infini ne peut être ni composé ni simple, en d’autres termes qu’il ne peut exister. Ainsi le corps infini ne peut pas être composé, si l’on suppose que les éléments naturels sont en nombre fini, comme ils le sont en effet ; car nécessairement les éléments contraires qui le forment doivent être plus d’un, et comme il faut qu’ils se fassent contrepoids pour que le composé se conserve, il est bien impossible que l’un deux soit infini, attendu que par cela seul qu’il serait infini, il détruirait toujours tous les autres. Supposons que la puissance qui est dans un des deux éléments composants, soit inférieure à celle de l’autre, et que, par exemple, le feu et l’air composant l’infini, le feu soit fini, tandis que l’air serait infini. On croit que le feu suffisamment multiplié, mais d’ailleurs toujours fini, pourra faire équilibre à l’air ; je dis qu’il n’en est rien, et que l’air étant infini l’emportera sur une quantité quelconque finie de feu ; l’infini annulera toujours le fini quel qu’il soit. Si l’on dit que ce n’est pas un des éléments du corps infini qui est infini, mais que tous ses éléments sont également infinis, ce n’est pas plus possible ; car le corps est ce qui a des