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parce qu’il se produit accidentellement et indirectement ; et dès lors la fortune peut en être regardée comme la cause en tant que le fait est accidentel ; mais, absolument parlant, le hasard n’est cause de quoi que ce soit. Par exemple, la cause en soi de la maison, la cause directe et essentielle, c’est le maçon qui la construit ; mais indirectement et accidentellement, c’est le joueur de flûte, si le maçon a ce talent ; et, pour reprendre l’exemple cité plus haut, il peut y avoir un nombre infini de causes qui font qu’un homme allant sur la place publique en rapporte son argent, sans y être allé du tout avec cette intention, et qu’il y soit allé simplement pour y voir un ami, ou pour y suivre un procès dans lequel il est ou défendeur ou accusateur.

On peut dire, avec non moins de vérité, que le hasard est une chose déraisonnable ; car la raison éclate dans les choses qui sont éternellement ou du moins le plus ordinairement de telle ou telle façon, tandis que le hasard ne se rencontre que dans les choses qui ne sont ni éternellement, ni dans la majorité des cas ; et comme les causes de ce dernier sont indéterminées, le hasard est indéterminé tout comme elles. Néanmoins on peut, dans certains cas, se demander si les causes du hasard sont purement arbitraires. Ainsi un malade guérit sans qu’on sache au juste à quoi rapporter sa guérison. Est-ce au bon air qu’il a respiré ? Est-ce à la chaleur qu’il a ressentie ? Ou serait-ce encore à la coupe de ses cheveux, qu’il a fait raser à un certain moment ? Ces trois causes possibles sont accidentelles également ; mais il y a même parmi ces causes un certain degré ; et les unes sont certainement plus rapprochées que les autres.