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peut soutenir également qu’elle ne naît point et qu’elle ne périt point. Ce qui périt en elle, c’est la privation ; mais en puissance, elle-même ne naît ni ne périt. Loin de là, il faut nécessairement la concevoir comme impérissable, et comme n’étant point engendrée, c’est-à-dire comme ne devenant pas. Elle est, et elle subsiste ce qu’elle est. En effet si elle naissait et se produisait comme se produisent du non-être à l’être les phénomènes qu’elle subit tour à tour, il faudrait qu’il y eût antérieurement à elle quelque principe primordial d’où elle pût sortir, un sujet d’où elle pût naître ; or, c’est là précisément sa nature propre de servir de sujet et de support ; et à ce compte, la matière existerait avant même de naître, puisque c’est elle qui est le sujet primitif où s’appuie tout le reste, et d’où vient originairement et directement la chose qui en sort. Mais la matière ne peut pas plus périr qu’elle ne peut naître ; car étant le terme extrême, comme elle est le terme premier, il faudrait qu’elle rentrât en elle-même, et il s’ensuivrait qu’elle aurait péri avant même de périr. Mais ce sont là des impossibilités auxquelles il ne convient pas de s’arrêter davantage.

Quant an principe de la forme que je devrais traiter après celui de la matière, ce n’est pas à la Physique, mais à la Philosophie première de déterminer avec précision si ce principe est unique, ou s’il est multiple, et d’en étudier la nature spéciale dans l’un ou l’autre cas. Je renvoie donc à la Philosophie première cette théorie importante ; et je ne veux parler ici que des formes naturelles périssables. Ce sera l’objet des démonstrations qui vont suivre ; car je me suis borné jusqu’ici à établir seulement qu’il y a des principes, et à faire voir quelle