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s’il devient blanc, ce n’est pas davantage en tant que médecin, c’est en tant qu’il était noir ou de telle autre couleur. Mais s’il réussit ou s’il échoue en soignant une maladie, c’est alors eu tant que médecin et comme médecin qu’il agit. La distinction est évidente ; il suffit de l’appliquer à l’être et au non-être. De même qu’on dit au sens propre que c’est le médecin qui agit ou qui souffre, quand il agit ou souffre expressément comme médecin, de même quand on dit qu’une chose vient du non-être, cela veut dire simplement qu’elle devient ce qu’elle n’était pas.

Si les premiers philosophes se sont égarés, c’est qu’ils n’ont pas fait cette distinction si simple, entre ce qui est en soi et ce qui est accidentellement ; et cette première erreur les a conduits à cette autre erreur, non moins forte, que rien autre chose que l’être lui-même ne se produit ni n’existe, et qu’il n’y a point de génération des choses, tout étant immobile et un. Nous aussi nous convenons qu’absolument parlant rien ne vient de rien, du non-être : mais indirectement et accidentellement, quelque chose peut très bien venir du non-être. Le phénomène vient de la privation, qui se confond avec le non-être, c’est-à-dire que la chose devient ce qu’elle n’était pas. J’avoue que cette proposition est, au premier coup-d’œil, faite pour étonner ; et on ne comprend pas bien d’abord que, même en ce sens restreint, quelque chose puisse venir de rien. Mais il faut bien remarquer que ce n’est pas seulement du non-être que l’être vient par accident ; c’est aussi de l’être. L’être vient de l’être, d’une manière générale et peu précise, comme l’animal pris généralement vient de l’animal, aussi bien que l’animal pris particulièrement