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Les arguments qu’on vient d’opposer à la théorie de Mélissus n’ont pas moins de force contre celle de Parménide, qui lui aussi admet des hypothèses fausses et qui n’en tire pas des conclusions plus régulières. Il y a d’ailleurs contre le système de Parménide des objections toutes spéciales. Une première donnée fausse, c’est que Parménide suppose que le mot d’Être n’a qu’un seul sens, tandis qu’il en a plusieurs. En second lieu, sa conclusion est irrégulière en ce que même en admettant que le blanc soit un, par exemple, il ne s’en suit pas du tout que les objets qui sont blancs ne soient qu’un. Évidemment ils sont plusieurs. Le blanc n’est un, ni par continuité ni même par définition. L’essence de la blancheur ne se confond pas avec l’essence de l’être qui est affecté de cette blancheur. En dehors de cet être, et indépendamment de lui, il n’y a pas de substance séparée qui soit la blancheur ; et ce n’est pas en tant que séparée qu’elle diffère de lui, c’est par son essence ; or c’est là ce que Parménide n’a pas su discerner.

Ainsi, quand on soutient que l’être et l’un se confondent, il faut nécessairement admettre que l’être auquel l’un est attribué, exprime l’un tout aussi bien qu’il exprime l’être lui-même, mais que de plus il exprime l’essence de l’être et l’essence de l’un. L’être devient alors un simple attribut de l’un, et le sujet même auquel on prétend attribuer l’être, s’évanouit et n’existe plus ; c’est alors créer un être qui existe sans exister. C’est qu’il ne faut sérieusement considérer comme être que ce qui existe substantiellement. L’être ne peut pas être son attribut à lui-même, à moins qu’on ne prête arbitrairement d’autres sens à l’idée d’être ; mais elle n’a cependant