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et s’il nomme Aristote, c’est pour rappeler une tradition fort suspecte, conservée par Simplicius d’après Porphyre, sur les observations chaldéennes que Callisthéne aurait transmises à son oncle. Il est clair que Laplace n’avait jamais entendu parler de la Physique d’Aristote. Mais nous qui la connaissons, nous pouvons défendre l’esprit humain du reproche qu’on lui adresse si gratuitement. L’esprit humain était resté si peu indifférent à cette question si vaste et si curieuse du mouvement, que plus de vingt-deux siècles avant Laplace, la Grèce par ses plus beaux génies en avait tenté la théorie, et que cette théorie expliquée, commentée, adoptée ou combattue, avait fait école chez tous les peuples civilisés, dans cet intervalle de temps qui va de Périclès au siècle de la Renaissance. On n’avait donc pas oublié ni négligé cette question. Seulement Laplace, comme Cotes et tant d’autres, avait perdu la tradition, et il dédaignait le passé, faute de le connaître[1] ; ce qui est plus ordinaire qu’on ne pense, et ce qui est fort nuisible aux vrais progrès de l’esprit humain, pour qui l’on témoigne cependant tant de sollicitude.

  1. Ce dédain n’atteint pas seulement Aristote, et il s’étend jus-qu’à Descartes, Leibniz et Malehranche, dont Laplace blâme les vains systèmes et les hypothèses stériles.