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en placer une foule d’autres. Ce sont toujours les mêmes labeurs, c’est toujours la même docilité, jusqu’au jour où, vers la fin du XVIe siècle, l’esprit nouveau s’insurgera avec fureur contre Aristote, et se bornera à l’insulter parce qu’il ne peut plus le comprendre[1]. Pour moi, loin de blâmer ces commentateurs soumis et fidèles, je les loue d’avoir conservé au travers des âges le goût de ces nobles études, et d’en avoir entretenu si bien le culte. On n’a pas toujours à dire des choses originales et neuves sur ces grands sujets, de la nature, de l’espace, du temps, de l’infini, du mouvement et de l’éternité. C’est encore beaucoup de les méditer sur les traces d’autrui, quand on ne se sent pas la force de se passer de guide ; et ce n’est pas la moindre part de la gloire d’Aristote d’avoir si longtemps et si fermement soutenu l’esprit humain dans ses défaillances.

  1. C’est la seule excuse pour des livres tels que celui de Ramus Scholarum Physicarum libri octo (Paris, 1565, avec privilège royal de 1557). Ce livre, qui ne manquent de science ni d’esprit, est un long tissu d’outrages, d’une violence qui ne se relâche pas durant 400 pages. Ces invectives de l’infortuné novateur prouvent évidemment que le sens de la physique péripatéticienne est perdu; et Ramus est très sincère quand il n’y voit qu’une suite d’arguties et de subtilités, indignes de l’étude des philosophes et des physiciens. Bacon ne pense guère plus de bien de la Physique d’Aristote. Voir les Cogitationes de natura rerum, §§ 3 et 4.