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très-éclairé qui soit à même de chercher le degré d’exactitude que comporte la nature de la question dont il s’occupe ; et exiger des démonstrations d’un orateur, ou se contenter, en géométrie, des simples probabilités, c’est à peu près la même chose. Cependant, on ne peut bien juger que de ce qu’on sait très-bien ; aussi l’homme très-instruit est-il en état d’apprécier jusqu’aux moindres détails des objets, tandis que celui qui n’a que des connaissances peu approfondies, se contente de les juger en masse. Voilà pourquoi la jeunesse est peu propre à l’étude de la politique ; car il lui manque l’expérience des choses de la vie, qui sont précisément celles dont traite cette science. Ajoutons que cet âge, étant dominé par les passions, ne pourrait tirer aucune utilité de pareilles leçons, puisque le but principal de la politique est l’action, et non pas la connaissance. Au reste, qu’on soit jeune par les années, ou qu’on le soit par le caractère, l’effet est le même ; car ce n’est pas le temps qui fait l’inconvénient, mais l’habitude de vivre assujetti aux passions, et de se laisser entraîner à tous les objets. En effet la connaissance, chez les hommes de ce caractère, est accompagnée de légèreté et d’irréflexion, aussi bien que chez ceux qui n’ont aucun empire sur eux-mêmes ; au lieu que, pour ceux qui savent conformer leurs désirs et leur conduite à la raison, la science de la politique peut être extrêmement utile. Voilà ce que j’avais à dire sur le caractère propre de ceux qui veulent étudier cette science, sur les dispositions d’esprit