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avait trop négligé, et quelquefois tout-à-fait perdu, de vue cette partie de la constitution morale de l’homme ; il était d’autant plus utile d’y revenir, de reconnaître et de constater son influence, que c’est dans la juste appréciation de cet ordre de faits que consiste essentiellement l’éducation pratique, qui n’est peut-être que l’art d’apprendre à là jeunesse, dès l’âge le plus tendre, à vouloir ce qui est bien ; et à ne vouloir pas ce qui est mal. D’un autre côté, si Platon parle plus au sentiment et à l’imagination, s’il est suivant sa coutume, plus éloquent et plus entraînant dans l’exposition qu’il fait de sa doctrine du juste et de l’injuste, Aristote fait de ces idées une analyse plus exacte et plus vraie ; il en démêle mieux la véritable ori-

    sentiment de plaisir ou de peine, à différents degrés. Quoique dans un grand nombre de cas, ce sentiment ne soit pas nettement aperçu, et ne puisse être, par conséquent, l’objet direct et immédiat de la conscience, il est facile d’en constater l’existence par une induction qui ne saurait donner lieu au moindre doute. Cette observation, qui n’avait point échappé à la sagacité d’Aristote, puisqu’il y revient expressément dans plusieurs endroits de ses ouvrages, a peut-être été trop négligée par les écrivains modernes qui ont traité de l’analyse de nos facultés : elle a des conséquences importantes, et fait voir, par exemple, la fausseté de la distinction qu’on établit souvent entre ce qui est agréable, ou pénible, ou indiffèrent.