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produire, étant semblables, et disposés de la même manière, à l’égard l’un de l’autre, il en doit naturellement résulter le même effet.

Comment donc n’y a-t-il personne qui jouisse d’un plaisir constant ? C’est que l’homme est faible, et que tout ce qui tient à l’humanité ne saurait être dans un état d’activité continuelle. Il n’y a donc point de plaisir [continuel] : car le plaisir suit l’action ; certains objets nous plaisent, quand ils sont nouveaux ; mais ensuite ils ne nous plaisent plus autant, par la même cause. En effet, d’abord l’esprit s’y arrête, et y applique avec ardeur toute son activité, comme on applique sa vue quand on regarde avec attention : bientôt il n’y a plus une aussi grande énergie d’action ; mais on se relâche, et le plaisir a aussi moins de vivacité.

On pourrait croire que tous les hommes désirent le plaisir, parce que tous aiment la vie ; car elle est un genre particulier d’activité, et chacun en montre davantage pour les choses qu’il aime, et par l’espèce particulière de facultés qui peuvent s’y appliquer, comme le musicien, par l’ouïe, pour les chants et la mélodie ; l’homme avide d’instruction, par l’esprit, pour les contemplations ou les propositions générales, et ainsi du reste pour chaque genre. Mais le plaisir qu’ils trouvent à exercer leurs facultés en perfectionne les actes ; et c’est lui, par conséquent, qui rend plus parfaite la vie dont nous venons de voir que tous les hommes sont avides. C’est donc avec raison qu’ils sont aussi avides du plaisir ; car c’est lui qui rend plus par-