Page:Aristote - Morale, Thurot, 1823.djvu/497

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

soi-même. Au reste, comme je viens de le dire, on est, en général, dans l’obligation de payer ses dettes ; mais, s’il y a des motifs d’honneur et de nécessité plus puissants pour donner, c’est vers ce dernier parti qu’il faut pencher. Car, dans certains cas, il peut n’y avoir pas une obligation égale à rendre le service qu’on a reçu, lorsque l’un a obligé un homme dont il connaissait la probité, tandis que l’autre rendrait le bienfait à un homme qu’il regarderait comme vicieux et méchant. Un homme peut encore refuser quelquefois de prêter à celui qui lui a prêté : car celui-ci l’a fait dans la persuasion qu’il serait remboursé, ayant affaire à un homme d’honneur ; au lieu que celui-là n’espère pas que son argent lui puisse être rendu par un débiteur sans probité. Si donc la circonstance est réellement telle qu’il la suppose, il n’y a pas égalité de considération [de part et d’autre] ; et, s’il n’en est pas ainsi, mais que celui qui refuse le croie, il semble au moins qu’il y ait quelque raison dans son procédé.

Ainsi donc la manière de raisonner à l’égard des affections et des actions, se modifie, comme on l’a déjà dit bien des fois, suivant les circonstances qui y donnent lieu[1]. Toujours est-il évident qu’il

  1. Le sens que j’adopte ici me semble plus conforme au texte et à la liaison des idées, et même à celui de la paraphrase, dans cet endroit, quoiqu’un passage correspondant de la Morale à Eudemus (l. 7, c. 11) semble indiquer un sens un peu différent de celui-là. « Les définitions qu’on donne de l’amitié, dans