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nu avec toi que, suivant les lois, il est plus honteux de commettre l’injustice que de la souffrir, et tu feins de croire que cela est vrai aussi suivant la nature : mais c’est tout le contraire ; car, suivant la nature, ce qu’il y a de plus honteux et de plus coupable, c’est de supporter une injustice, puisqu’il n’y a qu’un vil esclave qui puisse y consentir, et que tout homme de cœur en est révolté.

« C’est la multitude, faible et lâche, qui a fait ces lois qui prononcent qu’il est infâme de commettre une injustice ; parce qu’elle redoute les hommes forts et courageux, les hommes habiles dans la science du gouvernement, qui joignent à des talents supérieurs une âme énergique et ferme. C’est à ceux-là, en effet, qu’appartient le droit de commander à tous les autres, de posséder tout, de satisfaire tous leurs désirs, sans réserve et sans contrainte. Voilà cette vérité que tu prétends chercher, voilà la véritable vertu, le vrai bonheur : en un mot, la prééminence du fort sur le faible, telle est la loi de la nature.

« Tu le reconnaîtras, si, laissant de coté la philosophie, tu veux consulter un meilleur guide. En effet, Socrate, la philosophie est bonne pour occuper quelques moments le loisir de la jeunesse : mais, dans l’âge avancé, il est ridicule de s’appliquer à cette étude futile, qui ne nous apprend