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doit point rechercher un ami qui le serait malgré lui. [Il faut agir] comme si l’on avait été dans l’erreur au commencement, et obligé par une personne dont on ne devait pas accepter ou attendre des bienfaits, puisqu’on ne les a pas reçus comme venant d’un ami qui n’avait en vue que le plaisir d’obliger. En un mot, il faut se libérer comme si l’on avait reçu le bienfait à des conditions expresses ; comme si l’on n’avait consenti à l’accepter que parce qu’on pouvait le rendre, mais [persuadé que] si l’on n’avait pas été en état de le faire, celui qui vous a obligé ne s’y serait pas prêté[1]. Ainsi, l’on doit rendre ce qu’on a reçu, quand on le peut ; mais il convient de considérer d’abord par qui on est obligé, et à quelles conditions, afin de savoir si l’on doit, ou non, s’engager à ce prix.

Il y a encore à examiner la question de savoir si la reconnaissance et la dette contractée doit se mesurer sur l’utilité de celui qui a été obligé ; ou sur l’étendue du bienfait, et, par conséquent, être envisagée par rapport au bienfaiteur. En effet, l’obligé prétendra n’avoir reçu de celui-ci que des services qui étaient peu de chose pour lui, qu’il aurait pu recevoir également de tout autre ; cherchant ainsi à déprécier le mérite du bienfaiteur. Celui-ci,

  1. C’est encore ici un de ces passages où tous les commentateurs avouent leur embarras, et où le texte a évidemment souffert quelque altération importante. Le traducteur ne peut donc se flatter d’avoir saisi la pensée de son auteur ; il ne peut que la suivre d’aussi près que le permet l’obscurité du texte.